RECONSTRUCTION DU SEIN PAR LAMBEAU DIEP
Cette
fiche d’information a été conçue sous l’égide de la Société Française de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique (SOF.CPRE) comme un complément à votre première consultation, pour tenter de répondre à toutes les questions que vous pouvez vous poser si vous envisagez d’avoir recours à une reconstruction du sein par lambeau DIEP.
Le but de ce document est de vous apporter tous les éléments d’information nécessaires et indispensables pour vous permettre de prendre votre décision en parfaite connaissance de cause. Aussi vous est-il conseillé de le lire avec la plus grande attention.
DÉFINITION, OBJECTIFS ET PRINCIPES
La mastectomie ou mammectomie (les termes sont synonymes) correspond à l’ablation de la glande mammaire, d’un fuseau de peau et de l’aréole.
Elle reste malheureusement nécessaire dans certaines formes de cancer du sein.
Une demande de reconstruction mammaire est tout à fait légitime après mastectomie.
Le lambeau DIEP, pour Deep Inferior Epigastric Perforator flap, est une technique originale qui peut être proposée aux patientes présentant un ventre favorable.
L’excès de peau et de graisse à ce niveau est transféré au niveau du thorax afin de reconstruire le sein sans se servir de prothèse.
Cette reconstruction est prise en charge par l’Assurance-maladie.
OBJECTIFS
L’intervention chirurgicale a pour but de reconstituer le volume et les contours du sein par le transfert au niveau du thorax de l’excès de peau et de graisse de la région abdominale sous-ombilicale. La technique donne au sein reconstruit une forme et une souplesse naturelles puisqu’il est constitué des propres tissus de la patiente. Cette reconstruction est définitive et évolutive, elle suit les variations pondérales et les effets de la pesanteur comme le sein naturel.
Elle ne constitue que l’un des temps de la reconstruction mammaire complète qui comporte en outre, selon les désirs de la patiente, une reconstruction de l’aréole et du mamelon et éventuellement une intervention sur le sein controlatéral pour améliorer la symétrie.
ALTERNATIVES
La reconstruction mammaire n’est jamais obligatoire. L’utilisation d’une prothèse externe peut être suffisamment satisfaisante pour certaines femmes. La reconstruction reste un choix personnel.
Il existe d’autres techniques apportant des tissus d’une autre partie de votre corps (lambeau de grand dorsal). Chaque technique a ses avantages comme ses inconvénients propres.
PRINCIPES
L’ intervention est réalisée soit immédiatement lors de la mastectomie, on parle alors de
reconstruction immédiate, soit à distance de la mastectomie et des traitements complémentaires qui ont été nécessaires, on parle alors de
reconstruction secondaire.
La cicatrice de mastectomie est réutilisée comme voie d’abord en cas de reconstruction ; si elle peut parfois être améliorée, il est impossible de la faire disparaître.
L’intervention s’adresse aux femmes non fumeuses sans surpoids morbide présentant un abdomen favorable, idéalement celui que l’on aimerait faire disparaître au moyen d’une plastie abdominale.
L’intervention consiste à disséquer un lambeau, fuseau horizontal de peau et de graisse prélevé dans la région abdominale sous-ombilicale avec une artère et une veine mais sans le muscle grand droit et son aponévrose, puis à le transférer au niveau du thorax et gardé vivant grâce à la reconnexion des vaisseaux avec des vaisseaux de l’aisselle ou du thorax. Cette méthode fait appel à la microchirurgie.
Ce lambeau est modelé au niveau du thorax afin de reconstruire un sein naturel, sans apport prothétique, le volume apporté étant tel qu’il permet au chirurgien de se passer de l’utilisation de toute prothèse interne. Le sein reconstruit n’aura que peu de sensibilité au toucher.
La fermeture du site donneur engendre une cicatrice inférieure sur toute la largeur de l’abdomen.
L’amélioration de la silhouette au niveau du ventre est souvent perçue comme un agrément.
Aucun renfort synthétique n’est mis en place pour consolider la paroi abdominale car le fait de ne pas emporter le muscle grand droit et son aponévrose prévient la fragilisation de la paroi.
La symétrisation de l’autre sein et la reconstruction de la plaque aréolo-mamelonnaire (aréole+mamelon) sont le plus souvent réalisées ultérieurement lorsque le volume du sein reconstruit sera stabilisé.
La reconstruction mammaire ne modifie en rien la surveillance cancérologique.
AVANT L’INTERVENTION
Il s’agit d’une intervention délicate dont les pertes sanguines peuvent être importantes et qui nécessite que la patiente soit en bon état général.
Un bilan pré-opératoire habituel est réalisé conformément aux prescriptions.
Un angioscanner des vaisseaux de l’abdomen doit être réalisé avant l’intervention afin de permettre la planification de celle-ci.
Le médecin anesthésiste sera alors vu en consultation au plus tard 48 heures avant l’intervention.
Dans tous les cas, le praticien devra vérifier l’imagerie mammaire (mammographie, échographie) de l’autre sein, si le dernier examen de contrôle n’est pas assez récent.
Aucun médicament contenant de l’Aspirine ne devra être pris dans les 10 jours précédant l’intervention.
Les risques thrombo-emboliques de ce type de reconstruction sont assez élevés et il est possible que le médecin-anesthésiste vous prescrive des bas anti-thrombose (prévention de la phlébite) qu’il vous faudra porter avant même l’intervention jusqu’à votre sortie de l’établissement. Il vous est demandé également d’acheter une gaine de contention abdominale s’agrafant sur le devant qui vous servira de maintien dès le premier pansement. Elle sera alors portée en continu, pendant plusieurs semaines.
L’arrêt du tabac est indispensable. Il pourrait être à l’origine d’une oblitération (thrombose) des vaisseaux rebranchés et donc d’un échec de la technique.
TYPE D’ANESTHÉSIE ET MODALITÉS D’HOSPITALISATION
Type d’anesthésie : Il s’agit d’une anesthésie générale classique durant laquelle vous dormirez complètement.
Modalités d’hospitalisation : Une hospitalisation d’au moins 7 jours est habituellement nécessaire. La sortie sera conditionnée par le succès de l’intervention (absence de thrombose) et l’ablation du drainage.
L’INTERVENTION
L’ intervention peut durer quatre à six heures. En fin d’intervention, un pansement modelant du ventre est confectionné. Le sein reconstruit est découvert afin de faciliter la surveillance du greffon (couleur, chaleur, recoloration à la pression).
LES SUITES OPERATOIRES
Les suites opératoires sont peu douloureuses. Dans tous les cas, des antalgiques vous seront prescrits.
Un gonflement (œdème), des ecchymoses (bleus) du sein reconstruit sont possibles dans les suites ainsi qu’au niveau du ventre.
Les pansements seront réalisés régulièrement. Le port de la gaine (nuit et jour) est nécessaire pendant plusieurs semaines. La gêne au niveau du ventre peut être importante les premiers temps obligeant la patiente à se tenir un peu courbée. Il convient d’envisager une convalescence d’au moins quatre semaines. Il peut persister une faiblesse au niveau des muscles abdominaux qui peut gêner une femme sportive, mais cette perte de force est très faible : moins de 30% du côté du muscle disséqué.
LE RESULTAT
La reconstruction par lambeau de grand droit de l’abdomen (DIEP) restaure immédiatement un volume et une forme permettant à la patiente de s’habiller normalement avec un décolleté.
Le résultat final n’est cependant pas acquis d’emblée.
Au début, le sein peut apparaitre un peu trop figé avec une sensation de tiraillement au niveau du ventre.
L’aspect du sein reconstruit va progressivement évoluer. Il faut attendre deux à trois mois pour que votre chirurgien puisse apprécier le résultat et en particulier la symétrie.
Ce n’est qu’à ce stade qu’une éventuelle retouche est envisageable.
Chez certaines patientes, l’intégration psychique de ce volume insensible peut être difficile et une période d’ambivalence d’au moins six mois est souvent constatée. L’entourage médical et familial joue un rôle important dans cette période durant laquelle la patiente a besoin d’être rassurée.
Le but de cette chirurgie est d’apporter une nette amélioration sans toutefois pouvoir prétendre à la perfection. Si vos souhaits sont réalistes, le résultat obtenu devrait vous donner une grande satisfaction.
LES IMPERFECTIONS DE RESULTAT
Il est malheureusement impossible de reconstituer un sein parfaitement symétrique à l’autre.
Il persistera toujours une certaine
asymétrie des deux seins, qu’il s’agisse :
- du volume : la base du sein ne sera jamais parfaitement identique.
- de la forme : l’étalement des deux seins peut être différent.
- de la couleur : une petite différence est souvent présente.
- et de la sensibilité : le sein reconstruit est peu sensible.
Les cicatrices feront l’objet d’une surveillance attentive. Il est fréquent qu’elles prennent un aspect rosé et gonflé au cours des premiers mois post-opératoires. Au-delà, elles s’estompent en général pour devenir, avec le temps, peu visibles. Elles ne sauraient cependant complètement disparaître.
Les cicatrices peuvent parfois rester un peu trop visibles et présenter différents aspects disgracieux (hyper-pigmentation, épaississement, rétraction, adhérence ou élargissement) qui peuvent nécessiter un traitement spécifique.
A cet égard, il ne faut pas oublier que si c’est le chirurgien qui réalise les sutures, la cicatrice elle, est le fait de la patiente.
LES COMPLICATIONS ENVISAGEABLES
La reconstruction mammaire par lambeau DIEP est une intervention chirurgicale assez lourde, ce qui implique les risques liés à tout acte de ce type. Cependant, les suites opératoires sont en général assez simples. Toutefois, des complications peuvent survenir, certaines d’ordre général, inhérentes à tout acte chirurgical, d’autres loco-régionales plus spécifiques à la reconstruction du sein par DIEP.
Il faut distinguer les risques de complications liées à
l’anesthésie de celles liées au
geste chirurgical.
En ce qui concerne l’anesthésie : Une consultation, 48 heures au moins avant votre hospitalisation, est indispensable. Lors de cette consultation, le médecin-anesthésiste vous précisera les risques de l’anesthésie générale et vous exposera les différents moyens de lutte contre la douleur post-opératoire.
En ce qui concerne le geste chirurgical : En choisissant un
Chirurgien Plasticien compétent et qualifié formé à ce type d’intervention, vous limitez au maximum ces risques sans toutefois les supprimer complètement.
Heureusement les vraies complications sont peu fréquentes à la suite d’une reconstruction mammaire par DIEP. En pratique, la majorité des interventions se passe sans aucun problème et les patientes sont le plus souvent satisfaites du résultat.
Les complications pouvant survenir dans les suites de la reconstruction mammaire par DIEP sont :
- Une nécrose du lambeau par thrombose des microanastomoses vasculaires : la relative précarité de la vascularisation du fuseau de graisse et de peau par des vaisseaux rebranchés à l’aide d’un microscope explique ce risque. Il est nettement plus élevé chez les patientes diabétiques, très fortes ou fumeuses. L’arrêt du tabac est donc obligatoire. Une thrombose aboutit inévitablement à la nécrose et nécessite une réintervention pour enlever le lambeau. C’est un échec de la reconstruction.
- L’hématome : l’hématome est un risque inhérent à tout geste chirurgical. Il peut survenir malgré toute l’attention apportée par le chirurgien en per-opératoire. Cette complication peut nécessiter une reprise chirurgicale précoce.
- La nécrose graisseuse tardive (cytostéatonécrose) : elle crée des nodules fermes dans le sein reconstruit, indolores, il est aisé de les différencier d’une récidive de la maladie.
- Une éventration : l’intervention fragilise la paroi abdominale mais le risque d’éventration est minime car on n’emporte pas le muscle et son aponévrose. Il arrive parfois que l’abdomen présente une petite voussure sous-ombilicale au niveau du site de prélèvement des vaisseaux. Ceci n’a aucune conséquence pour votre santé ni pour votre confort.
- Une hernie : elle est également exceptionnelle.
Au total il ne faut pas surévaluer les risques et dans la très grande majorité des cas, cette intervention de chirurgie reconstructrice correctement réalisée, donnera un résultat très appréciable, même si la rançon cicatricielle reste inévitable.
Le recours à un Chirurgien Plasticien qualifié vous assure que celui-ci a la formation et la compétence requises pour savoir limiter le risque de complications, ou les traiter efficacement le cas échéant.
Tels sont les éléments d’information que nous souhaitions vous apporter en complément à la consultation.Nous vous conseillons de conserver ce document, de le relire après la consultation et d’y réfléchir « à tête reposée «.
Cette réflexion suscitera peut-être de nouvelles questions, pour lesquelles vous attendrez des informations complémentaires.
Nous sommes à votre disposition pour en reparler au cours d’une prochaine consultation, ou bien par téléphone, voire le jour même de l’intervention où nous nous reverrons, de toute manière, avant l’anesthésie.